Le pistolet Manufrance Le français en 7,65 mm

Une fois encore les hasards de la vie m’ont apportés une arme que je souhaitais vous présenter depuis un certain temps. Celle-ci a une place particulière pour moi pour au moins deux raisons. Primo : je suis un fan de Manufrance, secundo : cette arme est pour moi un des ancêtres du pistolet Glock (pas pour son système de verrouillage car il n’y en a pas mais pour son mécanisme de détente et de percussion). Nous nous réunirons, aujourd’hui, autour du pistolet Manufrance Le Français en 7,65 mm.

Un second article sera consacré à la version en 6,35 mm. On pourra alors comparer les deux armes et voir s’il y a des différences significatives.

Les caractéristiques de l’arme

  • Longueur de l’arme :  177 mm ;
  • Hauteur de l’arme : 122,5 mm ;
  • Épaisseur de l’arme : 30,5 mm ;
  • Le poids de l’arme : 646 grammes ;
  • Le calibre : 32 acp ;
  • Rayure du canon : 6 ;
  • Pas des rayures : 1 tour sur 250 mm (selon les normes CIP) ;
  • Longueur du canon (entrée de chambre à la bouche) : 83 mm ;
  • Capacité du chargeur : 8 coups ;
  • Production : environ 10 000 exemplaires de 1950 à 1969.

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La carcasse assemblée

La carcasse assemblée pèse : 323 grammes (avec l’axe de basculage du canon).

Les éléments de la carcasse

La carcasse nue est en acier. Elle entre dans un bloc capable de dimension : 146 mm x 96,5 mm x 15 mm (sans les tenons de guidage de la culasse inclus à l’éjecteur) , 17,9 mm (si l’on inclus les tenons). La pièce pèse : 196 grammes.

Contrairement à la majorité des pistolets automatiques, le ressort récupérateur ne se trouve ni près ni dans l’axe du canon (en dessous, autour …) mais à l’avant du chargeur dans un axe quasi perpendiculaire à celui du canon.

Le logement de la queue de détente est usiné sur la face gauche de la carcasse. Grace à cette configuration, le servant peu démonté simplement la queue de détente et approfondir l’entretien de son arme.

Le logement du canon a une largeur de 7,3 mm.

L’éjecteur est une pièce rapportée, il est maintenu en place par deux goupilles serties. La culasse est guidée à l’avant par le canon et à l’arrière par deux petites “oreilles” de l’éjecteur, qui empêche la culasse de se relever. Il n’y a pas de jeu entre l’éjecteur et la carcasse.

Un anneau de dragonne est monté sur le bas de la carcasse (coté gauche).

Le pontet est formé par l’usinage d’un trou oblong de dimensions : 24 mm x 36,2 mm.

Le logement du chargeur a une section : 27,5 mm x 11,1 mm.

Les bras relais de ressort récupérateur prennent place sur la carcasse dans deux alésages prévus à cet effet. Deux petits cylindres sont sertis sur la carcasse, il s’agit des butées de bras relais de ressort récupérateur. Il n’y a pas de jeu entre les pièces alors que les efforts du ressorts sont importants.

Sur la face gauche, un usinage important de la carcasse est la portée de la gâchette. Cette surface va donner à cette dernière sa position verticale. Dit autrement, selon la position de la gâchette sur cette portée, la gâchette sera plus ou moins haute. La gâchette et la queue de détente ne faisant qu’une seule pièce, c’est ainsi que le tir est commandé par l’action du doigt du tireur. On verra en détail cela dans un chapitre dédié au système de percussion et de détente.

Au même endroit mais sur la face droite de la carcasse, il existe la butée de la gâchette. Il s’agit de la butée avant.

L’axe de canon est en acier. Cette pièce est amovible, en enlevant cette pièce le canon peut être extrait de la carcasse. La tête de l’axe de canon se verrouille sur un pion porté par la carcasse. Pour désolidariser la culasse de l’arme, il faut au préalable démonter le canon.

L’axe de rotation a un diamètre de 4,5 mm. L’axe n’est pas maté par le pied du canon.

Le ressort et poussoir de relevage du canon est positionné à l’avant de la carcasse dans un logement prévu à cet effet. Lorsque l’utilisateur bascule la clé de démontage vers le bas ou enlève le chargeur, le canon se relève poussé vers le haut par le ressort et le poussoir de relevage.

La longueur dépliée est : 13 mm. Le diamètre extérieur du ressort est : 6 mm. Le diamètre du fil est : 1,1 mm.

La queue de détente est en acier. C’est une pièce complexe. On pourrait imaginer que cette dernière soit formée à partir de plusieurs pièces soudées. Ca ne semble pas être le cas. Il serait intéressant de se plonger dans les archives de Manufrance pour tenter de préciser les méthodes et moyens de production usités.

Il est à noter sur cette arme, qu’elle ne possède pas de barrette séparatrice. La barrette séparatrice sur un pistolet automatique est l’organe ou un des organes qui empêche le tir en rafale. Il n’est pas possible d’avoir de séparation de la gâchette et de la queue de détente sur le Le Français car la pièce est monobloc, elle ne peut par conséquent être déconnectée.

Le cran de gâchette a une hauteur de : 0,5 mm.

Une petite roue limite les frottements entre la queue de détente et la carcasse. Elle trouve sa place dans la queue de détente.

Le ressort de queue de détente et la tige guide de ressort de queue de détente ramène la queue de détente sur sa butée avant et sur le dessus de son rail de guidage. Les dimensions du ressort dépliée du ressort : 57 mm. Le diamètre externe du ressort est : 5 mm. Une des extrémités est évasée, elle mesure 5,5 mm. Le diamètre du fil est : 0,5 mm.

Le ressort récupérateur est très dur. Je n’ai pas désolidarisé le ressort de l’ensemble car la goupille est difficile à sortir. Monté sur sa pièce support, le ressort n’est pas compressible à la main. Le diamètre extérieur du ressort est 8,4 mm. Le diamètre du fil est d’environ 1,5 mm.

La tige guide du ressort récupérateur est en acier. Elle maintien le tout assemblé. Un trou existe sur le noyau de tige guide (près de l’entré du chargeur), ce qui permet d’y glisser une goupille ou autre ce qui va légèrement comprimé le ressort et permettre au servant de remonter la culasse plus facilement. L’effort sur les bras relais de ressort récupérateur sont importants.

Le support du ressort récupérateur est en acier. Il coulisse dans un logement prévu à cet effet à l’avant du logement du chargeur. Il est usiné de sorte que deux petites oreilles sont présentes de chaque coté. C’est sur celle-ci que viennent reposer les bras relais de ressort récupérateur.

Les bras relais de ressort récupérateur sont en acier, ils sont au nombre de deux. Ils sont répartis de chaque coté du chargeur.  Bien que soumis à des efforts important du ressort de percuteur, les pièces n’ont que de très légères bavures.

Le ressort de clé de démontage a deux usages. Le premier est de maintenir dans son logement la clé de démontage. Le second usage est de ramener cette dernière en position d’origine.

Il s’agit d’un ensemble de trois pièces : un support, une lame ressort, un rivet.

La clé de démontage est en acier. Elle verrouille le canon en position basse. Le canon reste verrouillé tant que le chargeur est engagé. Une fois que le chargeur est désengagé de son logement de quelques centimètres, la clé de démontage pivote sous l’effet du ressort de clé de démontage et libère le canon (le canon se relève). Le levier accessible par le servant est disponible sur le coté droit de la carcasse.

Les plaquettes de crosse sont composés de deux éléments, un support métallique et la plaquette en elle même.

Chaque plaquette est maintenue par une vis.

Je ne peux pas vous montrer de photo des vis de plaquettes car celles-ci ne me semblent pas d’origine.

Le canon

Le canon est monté sur la carcasse. Il mesure : 83 mm de longueur. Le corps du canon a un diamètre de : 12,5 mm. Soit une épaisseur de parois de : 2,34 mm au minimum.

Le bourrelet de la cartouche ne dépasse pas de la face arrière du canon mais est en revanche en retrait de 0,3 mm. Cette côte peut évoluer selon le fabricant de la cartouche. Il vient en butée sur un épaulement interne.

Deux excroissances existent sous le canon. Une à l’avant du canon sert de pivot au canon, elle a une largeur de 7,3 mm. Une à l’arrière qui sert à immobiliser le canon verrouillé en position basse, elle a une largeur inégale car le profile est conique, la partie haute est la plus large.

La chambre est entourée sur le dessus d’un renfort. Le diamètre de ce renfort est de : 17 mm. Trois stries servent de refroidisseur et “allègent” l’arme.

La rampe d’alimentation est en partie sur la carcasse et en partie sur le canon.

Le guidon est taillé dans le canon. Quelques usinages semblent obtenus par brochage ou par l’emploi d’étaux-limeur.

La culasse assemblée

Cet ensemble pèse : 208 grammes.

Les éléments de la culasse

La culasse nue est en acier. Le bloc capable de cette pièce est : 127,8 mm x 24,9 mm x 22,5 mm. Le poids de la pièce nue est : 187 grammes.

Le canal de percuteur a un diamètre de : 1,9 mm.

Le logement du percuteur est une succession de forage de divers diamètres. Un pour le canal de percuteur, un pour le logement du ressort de rebondissement, un pour le logement du ressort de percussion, un pour le logement du bouchon arrière. La profondeur de ces forages ont une grande importance car de ça dépendent certaines fonctionnalités de l’arme.

On retrouve en dessous de la culasse les rails de guidage de la culasse. Les encoches de bras relais de ressort récupérateur.

C’est marrant de noter qu’il n’y a pas de sécurité de percuteur. Rien d’anormal car il s’agit d’une arme ancienne … mais !! Est il nécessaire d’avoir ce genre de dispositif sur une arme qui utilise ce principe de percussion et de détente ?? Je lance le débat, qu’en pensez vous ? 

Une butée est aménagée à l’avant de la culasse. C’est cette surface qui est en contacte avec la carcasse. Il est à noter que cette butée est biseautée, elle n’est pas perpendiculaire au dessous de la culasse.

La face arrière de la culasse est aménagée pour recevoir le bouchon arrière de la culasse. Il est monté par un système d’encoche, il n’est pas vissé sur la culasse.

Le bouchon arrière est en acier. Ce système permet de démonter rapidement le percuteur et ses ressorts. L’entretien est aisé. Le corps de bouchon a un diamètre de 10,5 mm.

Le ressort de percussion a une longueur déplié de 53 mm. le diamètre extérieur est : 6,7 mm. Le diamètre de fil est : 0,8 mm.

La chose importante concernant le ressort de percuteur est que ce dernier arrête sa course avant que le percuteur n’atteigne sa butée, de sorte que le percuteur effectue un “vol libre” jusqu’à l’amorce de la cartouche

Le percuteur est en acier. La longueur du percuteur est : 68 mm. Le diamètre de la pointe du percuteur est : 1,8 mm.

Certaines parties du percuteur ont un diamètre diminué pour limiter les frottements.

Le percuteur est animé vers l’avant par le ressort de percuteur et repoussé hors de la cuvette de tir par le ressort de rebondissement.

Le ressort de rebondissement du percuteur est utile pour que la pointe du percuteur ne fasse pas saillie en permanence dans la cuvette de tir. La longueur du ressort est : 23 mm. Le diamètre extérieur est : 4,9 mm. Le diamètre de fil est : 0,6 mm.

Le second rôle du ressort de rebondissement du percuteur est de plaquer le percuteur en arrière afin que la gâchette vienne chercher ce dernier toujours au même endroit. La butée arrière du percuteur monté est le ressort de percussion.

En l’absence de ressort de rebondissement, le percuteur ne peut être saisi par la gâchette car il se trouve trop en avant. Il y a une différence de 2 mm entre les deux positions du percuteur entre butée arrière et butée avant (sans ressort de rebondissement).

L’extracteur, son ressort, son axe sont en acier. L’extracteur est monté sur le coté droit de la culasse.

L’extracteur est obtenu dans une tôle de 2,5 mm d’épaisseur. Attendu que la douille entre entièrement dans la chambre, la face arrière du canon doit avoir un usinage destiné au logement de l’extracteur.

Le ressort d’extracteur a un diamètre de 3,1 mm pour une longueur de 6,5 mm.

L’axe d’extracteur a deux diamètre, il est évasé. La partie inférieur a un diamètre de : 1,6 mm. La partie haute a un diamètre de 2,3 mm.

La hausse est en acier. Elle est montée par queue d’aronde sur le corps de la culasse. La largeur du cran de hausse est : 1,6 mm. La hausse dépasse de 2,7 mm du dessus de la culasse.

Le principe de détente et de percussion

C’est une des parties les plus intéressante de cette arme…enfin selon moi ! Elle demanderait à elle seule un article à part entière. C’est un dérivé de son petit frère en 6,35 mm, les mêmes principes ont été réutilisés ici.

La détente :

Comme nous l’avons déjà indiqué, la gâchette et la queue de détente ne font qu’une seule et même pièce. La butée avant et la hauteur de la gâchette sont commandées par des usinages sur la carcasse.

Bien que le tireur comprime le ressort de percussion en pressant la queue de détente, le poids du départ n’est pas insurmontable (probablement un peu plus compliqué pour une femme …selon le sujet observé). Le départ devient plus dur lorsque la gâchette atteint le pan incliné qui la forcera à s’abaisser et à libérer le percuteur. Il y a comme une bossette.

La percussion :

Pour qu’un cycle normal se produise, il faut que le percuteur soit sur sa butée arrière (c’est à dire sur le ressort de percussion grâce au ressort de rebondissement).

Le cycle de percussion peut avoir lieu. Le servant presse la queue de détente. La course de la détente se décompose en deux parties.

  • La première : La gâchette longe la portée parallèle au dessus de la carcasse , la gâchette conserve sa hauteur initiale. Cette course initiale existe pour comprimer le ressort de percussion.
  • La seconde : à la fin de première course, la gâchette rencontre un pan incliné vers le bas. Si le tireur continu son action sur la queue de détente, la gâchette s’effacera totalement vers le bas : le percuteur sera libéré.

Le chargeur

Sur le pistolet Le Français en 7,65 mm, le verrou du chargeur est porté par le chargeur lui même. L’encoche du crochet de chargeur se trouve à l’entrée du logement de chargeur.

Le profile du corps de chargeur mesure : 10,7 mm x 27 mm. La capacité du chargeur est : 8 cartouches.

Une large ouverture de 11,7 mm de large et 56 mm de haut traverse les cotés du chargeur.

L’élévateur de cartouche est en acier estampé. il se démonte par le haut ou par les larges ouvertures latérales.

Le ressort a une longueur dépliée de : 167 mm. Le profile extérieur du ressort mesure : 22,3 mm x 7,5 mm. Le diamètre du fil est : 0,9 mm.

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Conclusion

Je pense que le pistolet Le Français est une référence, un des jalons du schéma directeur menant aux pistolets modernes. Cette arme est pour moi un des ancêtres du pistolet Glock pour les raisons expliqués supra (pour son principe de détente et de percussion).

Manufrance est un manufacturier qui a un “truc” particulier. Toutes les armes de ce constructeur ont une conception optimisée et minimaliste mais terriblement efficace. Le nombre de pièce est minoré, les aciers et traitements thermiques sont bons, les finitions sont simples  mais de grande qualité. Ici pas de trace de micro-fusion. Cette arme est faite à l’ancienne, par des ouvriers qualifiés (ajusteur) et des machines outils traditionnels : tournage, fraisage, brochage…

Le pistolet Le Français est une arme très bien conçue, il renaitra sous le nom Beretta des décennies après. Il est intéressant de voir que Beretta ne reprendra que le principe de ressort récupérateur porté par la poignée pistolet et le canon basculant. La marque italienne ne reprendra pas le principe de percussion et de détente. Mais ceci est une autre histoire. Le démontage utilisateur est rendu simple par la bonne conception générale.

Le calibre est très courant à cette époque. Il n’est pas étonnant que Manufrance ait cherchée à occuper une part de ce marché lorsque l’on voit le succès des pistolets concurrents (Browning…). Le volume du Le français en 7,65 mm est supérieur à celui du browning 1910 mais a un atout de choc : son principe de percussion. Totalement sécure, il autorise le port de l’arme chambrée sans que le percuteur ne soit armé, sans nécessité de sécurité de percuteur et près à l’emploi.

On parle le plus souvent des produits de Manufrance (en l’occurrence ici des armes) néanmoins, j’espère avoir la chance de pouvoir faire des recherches et rédiger plusieurs articles sur les ingénieurs qui ont conçus les produits de la marque. Quels étaient leurs noms ? Quelle était leur formation ? Combien d’années en moyenne restaient ils chez Manufrance ? Ou allaient t’ils après Manufrance ? De combien d’ingénieurs était formé le bureau d’étude ? Que sont devenus les recherches de ces cerveaux ? Y a t’il dans les cartons d’archive des projets non fabriqués ? Auprès de qui se fournissaient ils les matériaux ? …..

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