Smith et Wesson est une entreprise qui a laissé une empreinte forte dans l’histoire de l’armurerie et du revolver en particulier. Beaucoup de modèles de cette marque mériteraient un article. Je souhaite aujourd’hui vous parler de l’un d’entre eux qui est l’amélioration du modèle 1899, il s’agit du modèle 10.
A travers cet article, je ne souhaite pas aborder la partie historique (cela ne m’intéresse pas). En revanche, je tenterais de découvrir et de vous montrer des différences et détails techniques qui nous/vous serviront de points de comparaison à l’avenir.
C’est d’autant plus amusant qu’un article est consacré à un équivalent récent du même constructeur. Les arbitrages sur l’arme moderne sont en rupture avec l’héritage de la marque. Vous pourrez découvrir l’article : ici.
Les caractéristiques du Smith et Wesson modèle 10 :
- L’épaisseur : 36,6 mm ;
- La hauteur : 123 mm ;
- La longueur (diagonale canon / crosse) : 283 mm ;
- Longueur du canon : 122 mm ;
- Le calibre : 38 Spécial ;
- La capacité : 6 cartouches ;
- Le poids de l’arme : 875 grammes ;
- Le mécanisme : simple et double action.
La carcasse
La carcasse est un sous ensemble comprenant :
- La carcasse ;
- La plaque de recouvrement ;
- Les 4 vis de plaque de recouvrement ;
- Le pivot du barillet.
La carcasse est entièrement en acier, elle est de type : K. Le bloc capable de la pièce est : 31,6 mm x 123 mm x 152,7 mm. Il s’agit d’une carcasse square butt. L’extrémité arrière est carré.
Le cadre, logement du barillet mesure : 46,34 mm x 37,46 mm.
Le logement du filetage du canon mesure 15,5 mm de long. Un lamage interne existe sur quelques millimètres en entrée de filetage.
Les axes des pièces du mécanisme sont débouchants. Ainsi, il est plus facile de les remplacer en cas de casse. Le diamètre de l’axe de marteau : 3,5 mm, de l’axe de queue de détente : 2,5 mm, de l’axe de verrou de barillet : 2 mm, de la butée du ressort de queue de détente : 2 mm.
L’épaisseur externe de la partie de la carcasse qui héberge le mécanisme est : 16,8mm. La largeur laissée aux pièces du mécanisme : 7,15 mm. Soit une épaisseur de parois moyenne : 4,825 mm.
Le logement de verrou de barillet est amovible. C’est rare donc soulignons le. Il est ainsi possible de le remplacer dans le cas ou le trou serait ovalisé, détérioré. Cette arme a probablement peu tiré car le bronzage de la pastille de percuteur est encore présent.
L’intérieur, le logement du mécanisme est irrégulier, cela laisse apparaitre des vagues très fines. Ces traces d’usinages sont une aubaine pour analyser les étapes de la fabrication. Les mouvements des pièces du mécanisme ne sont pas pour autant freinés. Le mécanisme ne “gratte” pas non plus.
Un petit rivet est posé dans un angle de la fenêtre du barillet. Cette pièce empêche que le barillet ne sorte de son logement. Un coup de pointeau, donné depuis l’intérieur de la carcasse, sertit la pièce sur celle-ci.
Un perçage à l’avant du pontet est le logement du poussoir et du ressort de verrou du barillet (verrou à la rotation).
Le pivot de barillet est frappé de deux numéros, celui de l’arme et un numéro commun à la carcasse et la plaque de recouvrement. Les trois pièces (carcasse, plaque de recouvrement, pivot de barillet) semblent être ajustées ensemble puis l’arme complètement montée est frappée de son numéros directeur.
Le pivot est bien ajusté à sa carcasse.
Le diamètre du tube axe de barillet est : 9,7 mm. Le diamètre de pivot de barillet est : 7,9 mm.
La plaque de recouvrement porte un numéro que l’on retrouve sur la carcasse et sur le pivot mais il n’est pas le numéro directeur de l’arme.
Il y a un bon ajustement entre la plaque de recouvrement et la carcasse. Les portées latérales sont coniques, ce qui facilite l’ajustage.
Quatre vis maintiennent la plaque de recouvrement en place. Deux des quatre vis sont identiques. Une des quatre vis sert au montage du pivot de barillet sur la carcasse. Le démontage de la plaque de recouvrement donne accès à l’intégralité des pièces du mécanisme.
Le canon et sa goupille
Le canon est un sous ensemble composé des pièces suivantes :
- Le canon ;
- La goupille de canon ;
- Le verrou de l’extension de l’étoile de barillet/éjecteur ;
- Le ressort de verrou ;
- La goupille du verrou.
Le canon est en acier, il mesure : 122 mm de long. Il possède 5 rayures. Le diamètre externe à la bouche est : 13,5 mm. Le diamètre externe à l’arrière est : 18,3 mm.
Le guidon n’est pas rapporté, il est taillé dans la masse d’une excroissance du canon. Tout comme le logement du verrou de l’extension d’éjecteur. Un poussoir animé par un ressort limite un peu les mouvements de ce dernier.
La goupille du canon mesure : diamètre : 1,75 mm, longueur : 18 mm. La goupille a été extraite de la droite vers la gauche sans soucis, sans dureté particulière.
Malgré l’age de l’arme, le démontage du canon s’est fait sans effort. Le filetage est en parfait état, le canon n’est pas collé. On aurait pu imaginer que de l’oxydation ait compliquée la tache… mais non.
Le filetage est usiné depuis un diamètre de 13,74 mm, sur une longueur de : 20,1 mm. Le pas du filetage est 36 tpi soit : 0,705 mm. Un épaulement est présent avant filetage, son diamètre : 12,7 mm sur une longueur de : 5,4 mm environ. Selon un ouvrage très documenté sur les revolver Smith et Wesson, le pas de 36 tpi est utilisé quelques soit le type de carcasse (J,K,L,N).
Le remontage du canon s’est déroulé tout aussi aisément. Le couple de serrage est relativement faible. Les photos ci-dessous nous montrent la position du canon après serrage à la main.
Le barillet
Le barillet mesure : 36,6 mm de diamètre pour une longueur de 39,7 mm (sans inclure la butée avant, uniquement le corps). La capacité du barillet est de 6 cartouches.
On retrouve ce nombre et cette disposition des pièces sur un nombre important de modèle de revolvers de la marque (du calibre 22 Lr au 44 mag) et ce bien après la création du modèle 10.
La largeur du logement de verrou de barillet (en rotation) : 2,6 mm. Les six logements sont usinés dans l’axe des chambres. L’indexation de l’étoile du barillet/éjecteur se fait dans le barillet, il n’y a pas de pièce rapportée.
La tige centrale de l’étoile de barillet/l’éjecteur a un diamètre de 6,5 mm. Le diamètre externe de l’étoile : 22,2 mm. Le diamètre de la partie servant à la rotation : 14,3 mm.
Le logement du verrou sur l’étoile de barillet/l’éjecteur est amovible. Plus exactement, une pièce creuse est vissée au niveau de l’éjecteur, le verrou de barillet la traverse.
La tige qui verrouille le barillet dans la carcasse est en acier. Le diamètre de la partie qui entre dans la carcasse est de 3 mm. La partie arrière : 3 mm. La surépaisseur : 4,05 mm. Le ressort du verrou : diamètre : 4 mm, long : 21,5 mm, diamètre de fil : 0,5 mm.
Le mécanisme
Le chien est en acier. Autant le logement du mécanisme est porteur de nombreuses traces d’usinage, autant les pièces mobiles sont propres et lisses. Le corps de chien est recouvert d’un jaspage foncé. Les finitions de cette pièce sont propres.
L’épaisseur du chien : 6,75 mm. La largeur du cran double action : 3,4 mm. La crête du chien est fine, elle a la même largeur que le chien.
Une bielle pour l’attelage du ressort de percussion est goupillée sur le corps de chien, la bielle est libre.
Le percuteur est libre dans son logement sur le chien, il bascule autour de son axe (il n’y a pas de ressort). L’axe est creux, il est serti à chaque extrémité. Le diamètre de la pointe du percuteur est : 2 mm.
Il y a un cran simple action et un double action. Les crans sont très sains, les angles ne sont pas avachis. L’arme a été bien conservée.
Une surface est importante, elle sert au rebondissement du chien. Elle se situe à sa base. Lorsqu’elle vient au contacte du poussoir de queue de détente elle est forcée de remonter d’environ un millimètre. Ainsi la pointe du percuteur ne peut faire saillie en permanence dans la cuvette de tir.
Un peu après l’armé simple action, le marteau arrive sur une butée arrière : la carcasse.
Le ressort de chien est une lame en acier. L’épaisseur de bas de lame : 1,8 mm et de 0,8 mm en haut. Une largeur de lame de 8,5 mm en bas et de 5 mm en haut. Un bronzage noir mat recouvre la pièce. Le ressort de chien est mis sous tension par une vis qui prend appui en bas de poignée.
La queue de détente est en acier. Sa largeur : 6,7 mm. Elle est le maillon d’une chaine. Elle agit sur ses deux extrémités : à l’avant sur le verrou du barillet, à l’arrière sur le chien et sur la rotation du barillet.
La particularité de cette pièce est que le dispositif qui agit sur l’élévateur de barillet possède une pièce en métal usinée et un ressort et non un ressort seul.
Une pièce fait la médiation entre la queue de détente et son poussoir, elle est goupillé. Il s’agit d’un petit cylindre.
Le ressort de queue de détente est hélicoïdal. C’est un ressort puissant. Les dimensions sont : diamètre : 5 mm, longueur : 24,5 mm, diamètre du fil : 1 mm.
Le poussoir de ressort de queue de détente est massif. Cette pièce a plusieurs fonctions. Elle pousse la queue de détente en avant mais aussi force le rebondissement du marteau. Ainsi, le percuteur ne peut faire saillie en permanence dans la cuvette de tir.
De part son mouvement d’avant en arrière, le poussoir de ressort de queue de détente engage ou désengage la sécurité de percuteur lorsque le servant actionne la queue de détente.
L’élévateur de barillet est en acier. La pièce est montée à l’arrière de la queue de détente. il est mu par un dispositif qui le fait basculer d’avant en arrière. Ce dispositif comporte deux pièces, elles sont montés dans la queue de détente.
L’épaisseur, la longueur de la pièce et la forme de la partie supérieure sont importantes (ici : 2,38 mm) car cela peut produire une rotation incomplète du barillet .
Deux positions pour cette pièce : une position haute, une position basse. C’est ce mouvement qui fait tourner le barillet autour de son axe lorsque l’on agit sur la queue de détente.
Le verrou de barillet limite la rotation du barillet, il est commandé par la queue de détente. Son ressort a une place particulière qui changera pour les versions plus modernes.
La sécurité de percuteur est en acier. C’est une pièce simple en L. La pièce est attelée sur le poussoir de ressort de queue de détente. J’ignore à partir de quelle année cette pièce est ajoutée. Elle n’existe pas sur le modèle 1899.
Le dispositif d’ouverture du barillet a plusieurs fonctions. Il prend appui sur l’extrémité du verrou de barillet et l’enfonce pour le déverrouillage du barillet.
Il bloque le chien si le barillet n’est pas correctement verrouillé.
Les éléments de visée
La hausse est taillée dans la carcasse, elle est par conséquent fixe. Le cran de hausse mesure : 2,4 mm de large pour 1 mm de profondeur.
Le guidon est taillé dans le canon. Le guidon dépasse au dessus de la génératrice supérieure de : 9 mm. La largeur du guidon : 2 mm.
Les plaquettes de crosse
Les plaquettes de crosse sont en bois.
Le numéros de l’arme est frappé à l’intérieur de la plaquette droite.
Une vis et un tenon les positionnent sur la carcasse.
Le logo de la marque est représenté sur un petit insert métallique serti à l’intérieur de la plaquette sur un disque en métal qui sert aussi au calage de la plaquette sur la carcasse.
Deux inserts en laiton sont utilisés par la vis de serrage des plaquettes. L’une est filetée, la seconde sert d’appui à la tête de vis.
Un quadrillage (un peu émoussé ici) participe à la préhension de l’arme. Un petit losange non quadrillé donne un petit charme retro.
La base de la poignée est large. Je trouve la prise en main très agréable. Mais bon ! c’est une question de morphologie.
Conclusion
C’est une arme que je connais bien car c’est avec ses successeurs que j’ai commencé dans le métier, guidé par mon camarade Michel…que je salue ici.
C’est un mécanisme très répandu dont la carrière s’étend sur des décennies. Pendant cette période, il sera implanté sur les revolvers Smith et Wesson quelques soit la carcasse.On le trouvera surdimensionné sur une carcasse N en calibre 44 mag (Mod 29) en 357 mag (Mod 27). On le trouvera sous dimensionné sur une carcasse J avec un canon court en calibre 22 Lr ou 38 sp (Mod 36, Bodyguard).
C’est une arme solide, massive faite pour durer. La qualité des fabrications de l’époque et le charme incroyable de cette arme aux formes rétros font toujours honneur à son producteur et à leurs propriétaires.
Il est marrant de voir que les pièces portent par endroits des traces d’usinages, de limes alors que l’on en trouve pas sur notre bodyguard contemporain. Les procédés de la micro-fusion ou d’usinage rapide ne nécessitent aucun ou peu d’ajustage.
La propagation de procédés de fabrication modernes et l’émergence d’une concurrence ont bousculés les marques installées, les forçant à remettre en cause leur héritage technique. Comment lutter à armes égales avec des producteurs qui utilisent massivement des techniques issues du moulage (micro-fusion, moulage du plastique) ?